En résidence de création à la Scène Nationale de Poitiers, l’auteur de la musique de Vertiges, écrite pour les chanteurs de l’Opéra de Bordeaux, l’Ensemble Ars Nova et la Compagnie de théâtre musical Le Grain a toujours composé pour le théâtre, la danse ou le concert (pour Jean-Louis Barrault ou Jean-Michel Serreau, Félix Blaska ou François Verret, les Percussions de Strasbourg ou le théâtre équestre Zingaro...) Mais Jean-Pierre Drouet est également l’un des plus grands percussionnistes actuels, travaillant aussi bien pour Berio, Stockausen, Xenakis, Kagel ou Aperghis qu’improvisant avec Fred Frith, Vinko Globokar, Henri Texier ou Louis Sclavis.

Guitare-guitare pour le premier des deux concerts de cette semaine consacrée à la guitare. Philippe Parant et Christophe Limousin croisent leurs voix complices, riches de leurs influences multiples, venues du rock and roll, du rhythm and blues, de Jimi Hendrix, de Miles Davis, de thelonious Monk, de John Coltrane ou d’Ornette Coleman à travers les grands maîtres de la guitare que sont John Mc Laughlin, John Abercombie, John Scofield ou Pat Metheny.

Après avoir mêlé le rock, le blues et le free jazz, en 1968, au sein du Free Rock Band (avec Barney Wilen, Joachim Kühn, Aldo Romano...) Mimi Lorenzini a beaucoup pratiqué le trio (avec Henri Texier, Jean-François Jenny Clark, Christian Lété, etc.), une formation qu’il affectionne et qu’il perfectionne, depuis dix ans, avec Ann Ballester et Jean-Luc Ponthieux. Ce trio construit d’élégantes architectures (avec des fondations, une charpente, des ouvertures, des matériaux, des couleurs) où il ne se prive d’aucun plaisir (swing, mélodie, harmonie...) et d’aucune émotion (tendresse, sérénité, humour...).

Il faut découvrir absolument ces deux étonnants solistes, une violoniste poitevine et un chanteur limousin, qui donnent le coup d’envoi des Rencontres Nationales Musicales consacrées à l’oralité, la tradition et la création : trois jours de débats, d’ateliers, de lectures, de vidéos, de concerts, de bals, avec des dizaines d’intervenants et de musiciens parmi lesquels Bernard Lubat, André Minvielle, François Rossé, Dominique Pifarély, Denis Badault, Jany Rouger, Jean-Marc Laureau, la Compagnie Lubat, Camelica, Brass Bocal, les musiciens des CFMI, etc. Trois jours de musique, de chant, de tchatche, de joutes, d’improvisations et de danse à Beaulieu, au Théâtre - Scène Nationale de Poitiers et à Carré Bleu.

Enthousiasmant, parfaitement inclassable, Four Walls rassemble quatre musiciens singuliers porteurs d’univers très divers (jazz, rock punk, classique, musiques ethniques, chanson, noise, improvisation...) où ils puisent sans retenue pour installer une irrésistible et intense folie douce. Au départ, il y avait Roof (le toît), un quartet déjà légendaire, qu’on a eu la chance d’entendre au Confort moderne, en 1998, quelques semaines avant la mort prématurée du génial violoncelliste Tom Cora. Ses partenaires, Phil Minton, chanteur-siffleur-éructeur-murmureur-free, Luc Ex, le bassiste du groupe anarcho-punk The Ex, et Michael Vatcher, percussionniste atypique venu du rock, ont décidé de poursuivre l’aventure avec Veryan Weston, vieux complice de Phil Minton. Un jaillissement ininterrompu d’exaltantes surprises.

On ne présente plus Joëlle Léandre, grande dame de la contrebasse qui a inspiré John Cage et Morton Feldman et avec laquelle les meilleurs improvisateurs de la planète ont voulu jouer, diva des musiques créatives et pétroleuse de l’improvisation, toujours entre deux avions, entre un coup de gueule et un éclat de rire... On l’a vue, ces derniers mois, en duo avec Pascal Contet, au théâtre avec Electre, en trio avec Les Diaboliques... Son imprévisible solo parle d’elle, de sa vie, autant que de la musique, de la contrebasse ou de la création. « Le jazz, dit-elle, c’est la musique du musicien... des bouts de vous, de voyage, de cris, de rage, d’amour... »

Bassiste, plasticien et photographe, Samuel Choisy travaille, entre une expo et un concert, pour une compagnie de théâtre à Porto. C’est de ses fréquents séjours lusitaniens qu’il a rapporté les nombreuses  photographies « musicales » qui font l’objet d’une projection-concert, sorte de voyage audiovisuel où il réunit ses passions pour la photo, la basse et le Portugal. Pour l’accompagner dans cette aventure, il a invité son complice Paul Brousseau, poly-instrumentiste et improvisateur (promis, par Claude Barthélémy, un brillant avenir), à explorer, avec lui, les fascinants rapports qui se tissent entre les images et la musique.

Ses collègues musiciens, comme les vrais amateurs de jazz ont toujours su que Jef Sicard était un grand. Depuis trente ans, chacun évoque avec une admiration tintée de respect ses trop rares concerts, sa trajectoire trop discrète, sa quête intime et singulière des limites qu’il explore avec un mélange de folie et de sagesse : limites où l’extrême rigueur bascule vers une impérieuse exigence de liberté, où la plus solide maîtrise se dérobe pour laisser la place à un enivrant vertige, où l’énergie arrache de la matière sonore une incantation têtue qui s’ouvre soudain sur une jouissance légère et sereine. Son dernier disque, Le Rêve de Claude, a révélé la double évidence de sa singularité et de sa maturité. Le Monde loue alors le « poète généreux », Libération découvre « un musicien précieux dont chaque note semble essentielle », France Musique invite ce « jazzman luxueux… un chercheur qui trouve », Jazzman évoque « son univers qui tient du conte philosophique et nu narguilé », Jazz Magazine le salue d’un « Disque d’Emoi »… Celui qui, après avoir fait ses premiers pas de musicien, à neuf ans, dans la fanfare de Châtellerault, a monté son premier groupe de jazz à Poitiers, a choisi d’enregistrer son prochain disque à Carré Bleu.

Il est des concerts qui laissent un souvenir intense et durable. C’est le cas du merveilleux (et spectaculaire) solo qu’vait donné Barre Phillips à Carré Bleu en février 2000. C’est aussi le cas de la tumultueuse rencontre improvisée qui avait réuni, en mai 1999, François Rossé et Sylvain Kassap. Depuis, François Rossé et Sylvain Kassap ont pris l’habitude de travailler ensemble avec l’orchestre de musique contemporaine « Laborintus » (qui joue Cavanna, Aperghis, Cage, Rebotier, Rossé, Kassap…), l’improvisateur s’adonnant de plus en plus à la musique écrite et le compositeur s’abandonnant sans aucune réserve aux délices de l’improvisation. Leur rencontre avec la sagesse zen de l’un des plus grands contrebassiste du monde promet d’être explosive et jubilatoire.

Frank Lowe st une grande et singulière figure du saxophone ténor qui, tout en restant fidèle à la « Great Black Music » avec des compagnons de route tels que Sun Ra, Alice Coltrane, Don Cherry, Sunny Murray, Muhal Richard Abrams ou Lester Bowie, est resté ouvert à d’autres expériences avec Eugène Chadbourne, Geri Allen, James Carter ou John Zorn. Depuis 1994, il travaille et enregistre régulièrement avec Bernard Santacruz, l’un de ces passionnants contrebassistes formés (comme Bruno Chevillon ou Claude Tchamitchian) dans la classe de contrebasse de Joseph Fabre et dans la classe de jazz d’André Jaume à Avignon, et qui a travaillé avec Charlie Haden, Ron Carter, Charles Tyler ou Dennis Charles. Au delà des styles, des générations et des cultures, leur duo généreux réinvente, à chaque concert, un chemin possible vers la liberté.