Colin Stetson
2011, l’irréprochable label Constellation sort d’une route qui semblait presque trop bien tracée en publiant le second album d’un illustre inconnu. Loin (quoique) des guitares progressives qu’affectionne le label canadien, le public découvre alors ce qu’on peut tirer d’un instrument aussi monumental que rare, le sax basse. Et si certains se sont peut-être un peu vite empressés de considérer Colin Stetson comme « LE saxophoniste ultime » (la prouesse technique pourrait laisser de marbre ceux qui ont déjà entendu un Evan Parker, un Gustafsson ou un Lazro dérouler leurs souffles continus), il a d’ores et déjà rejoint le panthéon des musiciens virtuoses.
Trublion aux côtés d’Arcade Fire ou Tom Waits, c’est en solo que son univers atypique trouve toute sa dimension. Respiration circulaire, multi-phoniques, growls, slaps... tout un arsenal technique au service d’une musique sereine et hypnotique, ponctuée de râles gutturaux, de bruits de clés, comme autant d’accidents de parcours sur des nappes mélodiques à la beauté sombre et troublante.

Philippe Petit
Activiste oeuvrant pour la diffusion et la reconnaissance des musiques expérimentales depuis près de trente ans, Philippe Petit est également un metteur en son hyperactif. Il joue régulièrement en live avec Murcof, Lydia Lunch ou les mythiques Faust, et a collaboré avec des personnalités aussi diverses que Jad Fair, Cosey Fanni Tutti (Throbbing Gristle), Graham Lewis (Wire), Guapo...

Dans le cadre du festival OFNI#10.

Anti-commercial, anti-rock’n’roll, suprêmement mal élevé et divinement raffiné, le Lydia Lunch’s Putan Club est le nouveau projet d’une artiste hors normes, poétesse fulminée, violente écrivaine adulée, chanteuse à la carrière sulfureusement rougeoyante, et impériale fouteuse-de-merde : Lydia Lunch.
Propulsée par le Putan Club - une cellule de résistance artistique iconoclaste, combo armé d’une implacable interaction entre peinture, arts graphiques et commentaires musicaux résolument outrecuidants - l’égérie de la No Wave new yorkaise poursuit cette œuvre unique initiée dès ’77 auprès de Brian Eno (au sein du Teenage Jesus & the Jerks sur la fameuse compil’ No New York) et savamment entretenue depuis auprès de Sonic Youth, Nick Cave, Neubauten, Alan Vega, Oxbow ou Henry Rollins.
Le Putan Club n’est pas un spectacle, ni une lecture, ni un concert : c’est un viol, un gang bang, une immersion totale - cœur, yeux, oreilles - dans la malséance, et son incroyable beauté. La poésie appliquée à la vie immédiate, sans fleurs ni effets de style, à sa violence, ses excès, ses religions, ses politiques, du sexe aux drogues et ce jusqu’à la mort. Implacablement, impitoyablement et souverainement. Une sincère expérience d’amour extrêmement féroce et sauvage.

Avant tout, Jean Louis est trois. Trois étoiles montantes d’une nouvelle génération du « jazz » d’aujourd’hui, échappées du groupe Radiation 10 et du collectif parisien Coax qui rassemble une bande de jeunes agités qui refusent obstinément de swinguer en rond.
Jean Louis pourrait jouer du jazz, donc. Mais ce serait trop simple et surtout bien réducteur quand on sait que ses membres lorgnent aussi bien du côté de Don Cherry que de Meshugga, Zu, les Melvins, Varèse, Femi Kuti ou James Brown...
Jean Louis est une machine. Machine à groover, usine à idées ; une gigantesque forge dans laquelle tous les matériaux musicaux dont ils se nourrissent sont recyclés, déformés, fondus en une pâte en fusion. Un amalgame saturé de sons brûlants et hurlants, objets vibrants plus ou moins identifiés dont on se demande parfois s’ils sont nés sous les coups de boutoir d’un archet belliqueux, d’une trompette passée à la moulinette de la disto ou plutôt d’une cymbale martyrisée. Difficile de s’y retrouver donc, tout autant que dire si cette musique-là tient du jazz, du métal, de l’électro voire de la pop.
Reste à faire tout comme eux, ne plus se poser de questions et se laisser submerger par ce son massif, imparable, qui prend aux tripes. Une entrée en matière en forme de mise en jambes et de trait d’union quasi idéal entre le rock des Zombie Zombie et le dance floor électro qui clôtureront ce Circuit 2012.

Séance de rattrapage indispensable pour ceux qui auraient osé rater Thomas Ankersmit en clôture du festival Bruisme #2 et l’occasion rare d’entendre en France l’un des papes de la noise musique expérimentale, cette soirée de solos nous fait basculer dans l’inouï et évoluer dans des univers sonores d’une densité pénétrante.
À mi-chemin entre l’ivresse de la découverte de contrées inconnues et une vague inquiétude face à la puissance évocatrice dont sont parfois capables certaines musiques, celles qui ne laissent pas indemnes, les performances de ces deux artistes bouleversent l’expérience du concert et offrent à l’auditeur l’occasion de remettre en question certaines certitudes qu’il pourrait avoir quant à la chose musicale.
Quand le bruit devient son, quand le chaos s’organise, quand la scène et la salle disparaissent pour s’ouvrir sur un monde inconnu, quand le corps tout entier est à l’écoute et que l’expérience auditive devient expérience émotionnelle, quand on ouvre enfin les yeux, atterrissage brutal, et qu’on réalise que finalement on est bien toujours dans ce bon vieux Confort Moderne, ne subsiste plus qu’une question : « mais qu’est-ce qui vient d’arriver là ?! ».
Soit, au final, juste une bonne grosse claque, comme on dit. Et c’est ce que ces deux gaillards-là ont la vilaine habitude de reproduire à chacune de leurs prestations.

17h00 - MORPHO(S)     Tarif unique de 4€
Eric BROCHARD (contrebasse)
Cécile LOYER (danse)

19h00 - BIG & Kasper T. TOEPLITZ
Edward PERRAUD (batterie), Fred GALIAY (basse),
Kasper T. TOEPLITZ (bass-computer)
 
21h30 - TO
Thomas TILLY (dispositif électro-acoustique)
 
23h00 - BAISE EN VILLE 
Natacha MUSLÉRA (voix, microphone, amplificateur)
Jean-Sébastien MARIAGE (guitare, amplificateur)

00h30 - DUO MURAYAMA - GUIONNET
Seijiro MURAYAMA (percussions)
Jean-Luc GUIONNET (saxophone)

18h30 - APEROUVERTURE
Thierry MADIOT (trombones, trompes)
Alfred SPIRLI (percussions, jouets)
 
21h00 - ROSSIGNOL GÉNOCIDE
Jean-Luc PETIT (sax), Adrien MONTEIRO (larsophone),
Fabrice FAVRIOU (guitare, cymbales)
 
22h30 - DUO SENHAOUI - BATTUS 
Christine SENHAOUI (saxophone)
Pascal BATTUS (surfaces rotatives)
 
00h00 - SUTURE 
Éric CORDIER (vielle à roue électrique)
Seijiro MURAYAMA (percussions)

Fire !
On le savait, Mats Gustafsson n’a jamais fait dans la dentelle... Nourri aux rugissements d’un maître d’armes comme Peter Brötzmann, il a toujours exploré les tréfonds les plus rugueux de ses saxophones, à grand renfort de slaps, de longs cris gutturaux déchirants, d’éructations d’une violence rare, peut-être même jusque chez son illustre aîné. Une exubérance sonore toute dans la tradition du free sauvage, mais qui a toujours lorgné du côté du rock, de son énergie comme de ses excès. Avec Fire!, il trouve le terrain de jeu idéal pour assumer ses penchants les plus noisy.
Quarante ans après le brûlot « Machine Gun » du Brötzmann, il ouvre à son tour le feu, armé de son sax-bazooka (mais aussi d’un Rhodes, d’électronique saturée, voire même d’une guitare, histoire de gronder encore plus haut et fort) et entouré de frères d’armes qui déroulent une rythmique de plomb, parfaitement binaire, massive, puissante mais toute en retenue comparée aux salves brûlantes dont nous arrose son leader belliqueux. Tous aux abris !

Le Nuage du Chien
Cette année, Fire ! a croisé sur scènes et à plusieurs reprises quelques guitaristes allumés. Oren Ambarchi, Jim O’Rourke, Stephen O’Malley... Autant de musiciens passionnants qui auraient pu facilement donner des idées de 1ère partie pour ce concert. Mais pourquoi aller chercher ailleurs ce qu’on a déjà sous la main ?! Parce que nous, dans le Poitou, on a Fabrice Favriou ! Batteur de formation, certes, mais grand saboteur de six-cordes surtout, il fomente depuis 2008 un monstrueux solo de guitare-etc., de plus en plus mûr, de plus en plus fort, de plus en plus beau... Pour sûr, nos régions ont du talent !

À écouter : ”La Chair Électrique” (2009, Label Orkesme).

Dans le cadre de Bruisme #1, festival des musiques libres organisé par Jazz à Poitiers qui aura lieu les 1,2 et 3 juillet.

17h au Confort Moderne (entrée libre)

Aliquid (France) : Jean-Marc FOUSSAT : VCS3, électronique - Sylvain GUÉRINEAU : saxophone

>> impro

Un duo tout en contrastes, un choc des cultures, comme un ruisseau de montagne qui traverserait des hauts-fourneaux, comme le chant d’un rossignol (enroué...) qui surgirait d’un vacarme industriel. Un duo où les deux voix ne font pourtant plus qu’une, communient et dessinent les contours, flous, de paysages sonores oniriques.

19h (entrée libre) :

Ninicha Haïku (France, Poitou) : platine, objets sonores, guitare, voix…

Poésie chaotique

Définitivement modestes, ils préfèrent rester anonymes. Ils livrent quand même ces quelques lignes de présentation, histoire d’y voir bien plus clair :

- "La mer déchaînée ! s'étalant jusqu'à Sado le Fleuve Céleste"

 - "Le son de la rame frappant les vagues glace mes entrailles cette nuit des larmes"

- "Une pierre qui roule sur la colline ne sait rien de sa trajectoire"

Limpide…

À partir de 21h :

Jean-Philippe Gross (France) : dispositif électro-acoustique

power electronics

En chef d’orchestre de circuits imprimés, les deux doigts dans la prise, JPG martyrise la fée Électricité et s’applique à un minutieux travail de destruction systématique du signal. Quand larsens, ronflettes, souffles, craquements et autres parasites deviennent musique à part entière.

La Colonie de Vacances (Pneu + Marvin + Electric Electric + Papier Tigre) (France) : guitares (x 5), batteries (x 4), claviers (x 3)

trance-rock quadriphonique

Principe simple : une salle, quatre coins, un groupe d’énervés dans chaque coin, le public au milieu. Résultat : riffs rageurs en tirs croisés, ping-pong de claviers allumés, va-et-vient de cymbales martelées, mur de son à 360 degrés... Conséquences : torticolis, dédoublement (au minimum) de personnalités, tympans encerclés, foot tapping, headbanging...
Une orgie sonore à ne plus savoir où donner de l’oreille.

Peeping Tom (France, Suède) : Pierre-Antoine BADAROUX : sax - Joel GRIP : contrebasse - Antonin GERBAL : batterie

>> free bop

"Le jazz est poussiéreux, le jazz c’est pour les vieux" ?! En trois coups de plumeau rageurs, les Peeping Tom font ravaler leur rengaine aux détracteurs dans une relecture intense, à cent à l’heure et totalement jouissive des thèmes phares du bebop, dopés par une énergie impressionnante et dynamités par un drive imparable.

19h - Apérouverture (entrée libre)

Arhkad - musique concrète abstraite
Craquements, déchirements, accalmies, frottements, souffles, explosions, silences… La mélodie acidulée d'un jeu vidéo, des drones méditatifs, des cliquetis électroniques... Un amalgame de matériaux sonores, un collage homogène où les sons discutent ensemble. 

A partir de 21h :

PEÜR - Noise bancale
Attentat sonore, musique de bric et de broc, instrumentarium en forme de musée des horreurs, avec parfois mais pas toujours des vrais instruments dedans, et même de la voix. Quelques tôles et parpaings aussi, pour faire joli... Féroce mais pas méchant, Peür vous prend au ventre.

Open Paper Tree - impro
Discussion au sommet entre trois maîtres de l’improvisation libre. Au-delà de toute technique, au-delà des instruments, une grande leçon de musique et cette faculté rare à dénicher le beau dans les excès sonores les plus violents.

Elwood & Guthrie - Folk rugueux
Sombre, crasseux et abrasif, leur folk primitif tout droit sorti des montagnes arides des Appalaches fraye avec quelques larsens plus ou moins maîtrisés, une batterie bringuebalante un poil bancale et la voix écorchée d’un ménestrel halluciné.

Après 30 années passées au sein du mythique combo The Ex, GW Sok n'a rien perdu de sa hargne. Qu'il murmure ses complaintes ou vocifère ses colères, ses textes, entre poésie et brûlot politique, sont désormais transcendés par les fulgurances free et les rythmiques convulsives des Cannibales toulousains.
Traductions de Léo Ferré, inspirations littéraires ou textes originaux, la voix s’allie aux instruments survoltés et donne naissance à ce son tout en contrastes, parsemé d’accents no wave, d’inflexions jazz ou ethniques, de ruades bruitistes ou de perturbations électroniques. Soit déjà beaucoup trop de références pour une musique qui échappe à toute tentative d'étiquetage... Peu importe les qualificatifs pourvu qu'on ait l'ivresse. Et l'ivresse, on l'a, débordante de partout, par vagues entières. Un raz de marée d'émotions, de tensions, entre gravité et humour absurde, improvisations débridées et écriture millimétrée. Quatre véritables bêtes de scène qui ne font jamais semblant, une sincérité dans le propos, tant verbal que musical, qui donne un son, un sens d'une rare intensité.