Dans « Nout », on peut entendre le nom de la déesse du ciel qui, dans la mythologie égyptienne, absorbe chaque soir le soleil avant de le délivrer le matin suivant. Mais on peut aussi entendre « nous », la première personne du pluriel où quand l’individu se (re)trouve dans le collectif. Chainon manquant entre Nirvana et Sun Ra, l’alliance Delphine Joussein-Rafaëlle Rinaudo-Blanche Lafuente s’applique à pousser leurs instruments dans leurs derniers retranchements, avec l’enthousiasme du savant fou devant ses fioles. Flûte, harpe, batterie : un mélange rare que le trio met sens dessus dessous à grands coups de pédales d’effets, d’électricité ou d’électronique. Dans le sillage des expériences de John Zorn aux confins du jazz et du noise, Nout imagine ses morceaux comme de véritables scénarios à rebondissements : on se croit dans Alien et on se retrouve dans Indiana Jones ; on débute les yeux fermés sur des sièges rouges et on termine en pogo sur le dancefloor.

En plus d’être graphiquement BG, NYX cale un joli sifflement entre les dents de celui qui le prononce. Tout est dit. Classe allure et provoc’ sonore. Power Trio posé sur la sororité autant que la sonorité, NYX ne s’embarrasse pas de théories de magazine sur l’empowerment. Les 3 musiciennes creusent ailleurs. Dans leurs royaumes personnels bruitistes, agités et forcenés. Chaque instrument, piano, voix et flûte, est sabordé pour mieux être réinventé. L’invention est constante et forme des récits tapageurs. Background chamboulé, gorge acérée et autres petites frappes aiguës, ça fouille, ça toise et ça électronise. Reste seulement à se perdre dans leur set très libre dans son discours, prodigieux dans sa densité. Énigmatique et, paradoxalement, plutôt rassembleur. Comme quoi, le libertaire peut avoir des vertus sociales. NYX (The Police), rappait J Dilla.

Les équipes de Jazz à Poitiers et du TAP viennent malheureusement d’apprendre que Youmna Saba, souffrante, n’est pas en mesure d’assurer son concert. Romain Baudoin sera bien présent et nous nous réjouissons de vous retrouver pour son concert à 20h30.
Si toutefois vous ne souhaitiez plus assister au concert, vous pouvez échanger votre billet TAP avec un billet pour un autre spectacle de la saison du TAP avant le vendredi 17 décembre.

Youmna Saba
Libanaise, Youmna Saba nourrit sa musique de l’électricité des rues beyrouthines. D’une ville à l’autre, la voici au centre de Paris pour continuer d’explorer de quoi sommes-nous faits dans une ville. Inlassable, Youmna Samna cherche. Et trouve. Les moyens de tisser des liens entre le système musical arabe et la musique électronique, de réunir technologie et composition. Son instrument, le oud, s’est ainsi vu pimpé de capteurs. Les anciennes habitudes s’éteignent, un être s’éveille.

Romain Baudoin : Arrehar Gascon, y’a l'téléfon qui son. Au bout du fil, c’est Romain Baudoin et Arrehar, son projet néo-trad’. C’est aussi et surtout une vielle à roue de 1930 et des K7 d’archives sonores des sixties collectées dans les Landes de Gascogne. Avec ces différents supports, Romain manipule et creuse toujours plus sous les racines de sa musique, de sa pratique et du territoire où elles sont nées. Arrehar, c’est le ‘retour aux sources’. Un contre-courant salutaire.

LE CONCERT DE PISCINE OLYMPIQUE EST ANNULÉ.

Ci-dessous les mots de Xavier Camarasa et Laurent Paris :

"Programmés par Jazz à Poitiers, nous nous réjouissions de venir jouer pour cette saison de concert. Mais notre duo ne montera pas sur scène en ce mois de novembre. Nos conceptions ouvertes de la musique comprennent autant le faire que le dire.
Aussi les exigences gouvernementales posées pour accéder aux lieux de vie courantes vont à l'encontre de ce que nous défendons. Imagination, ouverture, dialogue, réflexion, honnêteté, responsabilité sont des concepts balayés, rayés, effacés, quoiqu'on en dise, par les mesures dites "sanitaires en vigueur" et le passe du même nom, exigés à l'entrée des lieux de vie.
Irrémédiablement et d'une manière inédite dans nos sociétés, ces mesures divisent, écartent, séparent dans une absence de réflexion et une hypocrisie caractérisée. L'omerta ou la passivité ne nous semble pas être des réponses adéquates à cette politique de gestion mise en place par l'état de façon unilatérale et imposée.
Nos outils, les sons, ne sont plus suffisants pour dire notre désaccord. Aussi nous préférons cesser de jouer, plutôt que nous exprimer dans un cadre rétréci.
Nous vous donnons toutefois rendez-vous plus tard, le plus tôt possible, dans des temps plus sereins et libres, et avant de tirer le rideau pour cette fois nous remercions Jazz à Poitiers pour sa compréhension et cet espace d'expression précieux."

On écrivait pour Jazz à Poitiers en 2017 : "Nelly Mousset aime tout ce qui grogne, frotte, crie et tiraille". Bonne nouvelle, rien n'a changé. Tout, tout peut continuer. En plus profond, en plus intriguant et en plus ouvert, aussi. La contrebasse joue toujours les pivots de l'axe de jeu, le son est toujours au cœur du système vibratoire. Mais le regard s'est acéré, le toucher précisé davantage. S'il y a drone, c'est avec un sens de la finesse qui tire les moustaches de l'indicible. S'il y a voix, c'est avec le souci de l'entrelacer aux quatre cordes. Bien entendu, Nelly Mousset, passée par le Lobe, le ZAP et le CFMI n'est ni tombée de la dernière pluie, ni de l'oreille d'un sourd. Sa maîtrise sonore est sans cesse remuée puis renouvelée par un corps mis de plus en plus à contribution. Mis en question : comment le positionner ? Que raconte-t-il ? Est-ce l'image qui créé le son ou la vibration qui fait voir double ? Sans doute, peu de réponses explicites sont à attendre de ce premier concert jeune public et familial. Et c'est tant mieux, il restera autant de place disponible pour les sensations à recevoir d'une musique dont la moindre des qualités est de savoir frotter, grogner et tirailler. Le tout entre deux bouchées d'un goûter. Digestion assurée.

On écrivait pour Jazz à Poitiers en 2017 : "Nelly Mousset aime tout ce qui grogne, frotte, crie et tiraille". Bonne nouvelle, rien n'a changé. Tout, tout peut continuer. En plus profond, en plus intriguant et en plus ouvert, aussi. La contrebasse joue toujours les pivots de l'axe de jeu, le son est toujours au cœur du système vibratoire. Mais le regard s'est acéré, le toucher précisé davantage. S'il y a drone, c'est avec un sens de la finesse qui tire les moustaches de l'indicible. S'il y a voix, c'est avec le souci de l'entrelacer aux quatre cordes. Bien entendu, Nelly Mousset, passée par le Lobe, le ZAP et le CFMI n'est ni tombée de la dernière pluie, ni de l'oreille d'un sourd. Sa maîtrise sonore est sans cesse remuée puis renouvelée par un corps mis de plus en plus à contribution. Mis en question : comment le positionner ? Que raconte-t-il ? Est-ce l'image qui créé le son ou la vibration qui fait voir double ? Sans doute, peu de réponses explicites sont à attendre de ce premier concert jeune public et familial. Et c'est tant mieux, il restera autant de place disponible pour les sensations à recevoir d'une musique dont la moindre des qualités est de savoir frotter, grogner et tirailler. Le tout entre deux bouchées d'un goûter. Digestion assurée.

20h : visite nocturne des expositions Premier Degré de Johan Papaconstantino et Patrouille de nuit de Pierre René-Worms en présence d’un médiateur (environ 30 minutes)

Faire accord, jouer ensemble n’a rien de nécessairement harmonique. Il en va ainsi pour neigen. Faux ami hivernal, ce quatuor joue la définition même du mot allemand dont il tire son nom. Neigen, c’est tendre vers. Partir à la rencontre des autres et au final de soi-même. Antienne bien connues des improvisateurs. En gros, une façon de théorème d’Archimède où l’imprévisible remplace la flotte et où l’instinct subit frontalement les fameuses poussées. Pour cette petite bande de quatre, réunie par Nicolas Souchal, ce redux d’Archi opère au cordeau. La musique de neigen traque les textures venues de l’intériorité de chaque musicien pour peindre à traits serrés des climats communs. Très valable pour ce set, joué acoustique au cœur de l’expo de Johan Papaconstantino. Rageurs, explosifs et maîtrisés. Tous corps plongés dans l’indicible.

Will Guthrie est un chercheur impénitent à l’oreille sûre. Quiconque a déjà vu Will jouer sait combien ce batteur peut être multiple, que ce soit lors des “solos for one person à la fois” ou en compagnie d’Oren Ambarchi, lors de récents Bruisme. Sa frappe a recours au DIY et fait naître des intrigues sonores, une sorte de pandémonium électrisé par la mémoire de ses déplacements sur le planisphère. Exemple ciselé avec Nist-Nah où la tradition du gamelan est revisitée avec un combo de Magnificent 8 venus de la musique contemporaine comme de la libre impro. Enfin véritablement plusieurs, Guthrie peut placer des équations rythmiques au cœur d’un rituel accroché à sa moelle depuis ses années de formation australienne. Equations saisissantes qui amèneraient illico tout cancre à dépenser son pass culture en rapporteur, compas et autres Texas Instrument TI-30.

L’Ocelle Mare
Aride comme un désert et tordu comme une promesse de mafioso. Thomas Bonvalet a l’élégance d’agencer les limites astucieuses de son arsenal de récup’. On peut toujours s'amuser à entendre une mesure de blues Delta, ici, ou là, un carillon teutonique. On peut toujours se risquer à apercevoir un battement de genou chouré à l’Angus Young d'AC/DC. Mais la vérité semble, une fois de plus, être ailleurs. Peut-être à la rubrique des trucs et astuces d'un magazine comme Système D.

Sonic Boom
Au départ, Peter Kember était le demi de 3. De Spacemen 3, joué à 2 avec Jason Pierce. Puis il devint solo et fit Boom. Sonic Boom. Sous ce perso turbulent, sir Kember alterne les productions pour d’autres, Beach House et MGMT, et les saillies personnelles. Dans ces dernières, on retrouve la verve ciselée au meilleur du psychédélisme, à la plus pointue des expérimentations modulaires, à la plus réjouissante des soul. Topspin, comme disent les pongistes.

20h : visite nocturne des expositions Premier Degré de Johan Papaconstantino et Patrouille de nuit de Pierre René-Worms en présence d’un médiateur (environ 30 minutes).

Bruckner pour lancer des ponts, c’est idéal. Au-delà du jeu de mots digne du meilleur des jumelages franco-allemand, Bruckner c’est surtout le souvenir d’un concert magistral pour l’Orchestre des Champs-Élysées. Celui de 2008 où a sonné la Symphonie n°8 du compositeur autrichien. Pour fêter ses 30 ans, cette année, l’OCE exhume ce souvenir et un live inédit pour allier soin du son et circuit court. L’affaire est belle. Le concert sera gravé sur vinyle, fabriqué à Châtellerault, empochetté sous une sérigraphie made in La Fanzinothèque et rendu public au Confort Moderne. L’affaire est une affaire pictave. Pictave et rare. 100 exemplaires pressés en édition limitée fêtés façon orchestre éclaté dans chaque recoin du Confort Moderne. Inédit le live. Inédit le disque. Inédit ce parcours. 3 raisons excellentes de suivre pour guide, le seul plaisir d’une ‘Nouvelle Odyssée’ de l’Orchestre.